Ecriture et architecture

Photo by Peter Herrmann on Unsplash

J’ai participé hier à un atelier d’écriture organisé par la médiathèque et le CAUE de Nevers. Si vous êtes comme je l’étais avant hier et que vous ne savez pas ce qu’est un CAUE, je vais vous expliquer ça rapidement mais le mieux, c’est que alliez visiter le site internet de la Fédération Nationale des CAUE. En gros, ce sont des architectes qui se mettent au service de tout le monde (collectivités, particuliers…) gratuitement (vu qu’ils et elles sont payé.es par ailleurs) pour conseiller les gens qui ont des projets. Les CAUE sont répartis un peu partout sur le territoire et font aussi des formations, éditent des brochures d’infos…

Voilà, maintenant vous savez tout.

Nous n’étions pas très nombreuses (deux hommes seulement sur 6 personnes donc je me permets – vu qu’ici, je suis chez moi et que je fais donc comme je veux – de féminiser le tout) et nous avons travaillé pendant un petit peu moins de deux heures.

Pauline, l’animatrice (donc j’ai oublié le nom), nous a proposé d’écrire à partir de déclencheurs (des photos, des listes de mots…). Bon, il s’agissait plus d’exercices, de jeux autour de l’écrit que d’écriture proprement dite selon moi, puisque nous n’avons pas rédigé de véritables textes. L’architecture était le thème général et nous l’avons abordé par la tangente, ce qui m’a plu parce que j’avais peur en y allant de devoir écrire des descriptions longues et rébarbatives de bâtiments modernes absolument affreux.

J’ai quand même réussi à pondre trois paragraphes de ce qui pourrait peut-être bientôt devenir une nouvelle pour ce blog. Ce n’est pas encore sûr sûr mais je crois que je tiens le début de quelque chose – la preuve en est que depuis ce matin, des phrases tournoient toutes seules dans ma tête et que, quand il y en aura trop, il faudra bien que ça sorte, nom d’une pipe !

Enfin, je dis ça mais parfois, ça se forme et si je n’ai pas le temps (pas l’énergie) de coucher les phrases sur un papier (ou plutôt dans un fichier texte), ça s’évapore et je ne retrouve rien.

C’est d’ailleurs assez chiant pénible comme truc. Et même si j’ai l’occasion de les écrire quelque part (dans mon téléphone, dans des carnets, sur des fichiers un peu partout sur mon ordi), je me retrouve avec un amoncellement de bribes de poèmes, de chansons, avec des phrases isolées ou des débuts de texte sans queue ni tête. Tout ça en vain puisque la plupart du temps, je n’en fais strictement rien comme si, une fois l’impulsion passée, ce qui me paraissait digne d’intérêt et me farcissait le crâne pendant parfois plusieurs jours d’affilée, n’était qu’une fumée sans feu, une belle perte de temps et d’énergie. Il m’arrive de retomber dessus par hasard. Parfois j’aime, parfois je déteste.

Ça vous fait ça à vous ? Et si oui, comment faites-vous pour vous en sortir, concrètement ? Acceptez-vous sagement la perte ou au contraire, vous précipitez-vous sur la moindre flammèche pour la transformer en feu de joie ?

Sinon, en ce moment j’écoute ça – j’aime beaucoup à la fois les paroles (ça résonne grave dans ma teutê :-D) et la musique :

Bon allez, je vous colle les lyrics, histoire qu’on chante toutes en cœur ! Oooooooh !

[Verse 1]
Then I hear you leave
And I’m happy
Just for a moment I’m free
Then it dawns on me

Then our time has passed
Now it won’t last

And I’m getting nowhere fast
That’s a fact

[Pre-Chorus]
Peace to the night

Saw what I was really like
Start with a kiss
End with a fight

Peace come and go
Acting like you didn’t know
That I have lost my head

[Chorus]
Oooooooh
Oooooooh

And I’ll leave
So I know that you have your doubts

Oooooooh
Oooooooh

And I’ll leave
But I swear that I’m better now

[Verse 2]
Can you honestly
Live without me?
Cause you miss the fire
You can’t disagree

[Pre-Chorus]
Peace to the night
Saw what I was really like
Start with a kiss
End with a fight

I love a fight

[Chorus]
Ooooooooooh
Ooooooooooh

And I’ll leave
So I know that you have your doubts

même pas peur

Artistic work of painting representing salsa and bachata dancing croud night entertainment (source Getty images)

J’aimerais bien vous raconter mes aventures romanesques et mes amourettes sans importance mais bon, comment vous dire ça simplement : y’en a pas !

Je suis en pleine traversée du désert sentimental mais je vais plutôt bien. Comme si j’étais en train (en vrai) de me réapproprier ma vie. C’est fou parce que ça ne devrait pas. Sur le papier, ça ne paraît pas foufou : je suis de nouveau à Nevers, je suis au chômage (enfin, je ne gagne toujours plus ma vie avec mon activité professionnelle), je n’ai pas de mec et pas l’ombre d’un intérêt sexuel pour quiconque (à part pour Melvil Poupaud et Pio Marmaï mais ça ne compte pas), j’habite dans un studio de 15 m2 sans jardin, je n’ai même pas de chat et en plus, il caille grave…

Sur le papier donc, je devrais voir la vie en noir sombre. Sauf que, comment dire, je vais carrément bien. Je dirais même que j’aime de nouveau ma vie. Dingue ! J’en suis la première surprise.

La dernière fois que j’étais dans cet état mental, j’étais à Bordeaux et je vivais dans des conditions qui n’étaient pas du tout les mêmes. La seule chose en commun entre ces deux moments de ma vie, c’est que je n’avais pas de mec. Je n’irais pas jusqu’à dire que ceci explique cela mais quand même, ça me pose question…

Pour vous dire à quel point je me sens de mieux en mieux, j’ai commencé une nouvelle activité. Ça m’a pris un peu d’un seul coup. J’ai passé un coup de fil et paf ! Je me suis retrouvée le premier mercredi de janvier dans une salle avec d’autres personnes à essayer de lutter contre ma répulsion naturelle à être touchée par des gens que je ne connais pas.

Je vous vois venir : non, je n’ai pas commencé les partouzes ! En fait, depuis le 5 janvier, je passe mes mercredis soir à danser la Bachata. Et franchement, ce n’était pas gagné que j’aime ça ! Pour tout vous dire, c’était même le contraire. OK, j’adore danser depuis toujours (en soirée, je peux facilement danser pendant 2 ou 3 heures d’affilée). Mais je déteste qu’on m’impose quoi que ce soit à ce niveau, que ce soit des mains sur mon corps ou des pas imposés (je hais carrément les bals trad pour cette raison).

Donc là, on partait très très mal : c’est l’homme (ou la personne qui joue ce rôle) qui guide et qui indique à sa partenaire ce qu’elle doit faire, on danse très très (je vais en mettre un autre) très près l’un de l’autre, avec des figures très codifiées et le premier monsieur avec qui j’ai du danser s’était apparemment lâché sur les oignons et soufflait pas mal en comptant ses pas (merci le masque mais tu pourrais quand même mieux faire ton boulot, pfff). Sauf que j’y suis retournée la semaine suivante et encore celle d’après…

Je suis en plein franchissement des limites de ma zone de confort ; je suis gênée aux entournures et pas qu’un peu (genre hier soir, un gars m’a quand même dit « laisse-toi faire », ce à quoi j’ai répondu « évite de dire ce genre de choses à une femme, quand même, c’est limite ») mais quand je sors de la salle à 21h, dans le froid et la pluie, je suis heureuse.

Bon, je vous mets quand même une vidéo de Bachata (ah oui au fait, je n’aime même pas ce genre de musique) pour que vous vous rendiez compte de ce à quoi la chose devrait ressembler (bon, avec le groupe, on n’en est pas là, hein ! – on ne s’embrasse pas à la fin) :

Je mesure l’étendue des limites que je vais devoir encore franchir. Souhaitez-moi bon courage les amishes !

la haine des pigeons

Je ne me souviens plus d’où vient cette image, crotte de bique.

A chaque fois que je suis amenée à parler « pigeon » avec quelqu’un – ce qui n’arrive pas tous les quatre matins, je le concède – la personne en face de moi me raconte sa haine, sa détestation, son dégoût des pigeons.

Certains les nomment les rats des airs, d’autres les trouvent cons comme la lune… Bref, la plupart du temps, ils n’ont pas bonne presse.

Alors oui, ils font caca partout mais s’ils ont colonisé nos villes c’est parce que nous, les humains, leur donnons à manger dans nos poubelles.

Si vous habitez Paris – même si vous ne faites qu’y passer, d’ailleurs – et que vous vous retrouvez pas loin d’un parc (une simple plate-bande suffit) à la tombée de la nuit, vous pourrez voir des dizaines de rats sortir d’en dessous, se glisser dans des anfractuosités cachées et escalader les poubelles pour s’y nourrir. Ils ont investi nos villes parce que nous les nourrissons. Brrr, j’en ai froid dans le dos !

Mais revenons à nos pigeons ! Sont-ils idiots ? A priori, le fait de choisir de vivre dans des endroits avec un accès illimité à la nourriture n’est pas complètement absurde. Ils font comme nous (et comme les rats d’ailleurs). En fait non, ils font même mieux que nous puisque, jusqu’à preuve du contraire le béton, le bitume et le verre n’ont aucun pouvoir de création de nourriture… Et pourtant nous nous y entassons.

Ensuite, moi je les trouve plutôt placides et de bonne composition. Ils évoluent tranquillement par terre et se poussent juste assez pour que nous puissions passer sans leur marcher dessus. Ils roucoulent à qui mieux mieux quelle que soit la météo et ils ne sont pas agressifs, à part dans les hallucinations de ma grand-mère.

Là, il faut que j’explique évidemment pourquoi ma grand-mère voue une véritable haine aux pigeons. Il y a une trentaine d’années (mon grand-père vivait toujours), elle s’est mise à prendre beaucoup mais alors beaucoup trop de médicaments pour dormir. Son « médecin » (je mets entre guillemets ce mot parce que, vu ce qui suit, on peut douter de ses compétences professionnelles) lui avait prescrit des somnifères et lui avait dit qu’elle pourrait augmenter la dose régulièrement au fur et à mesure de l’affaiblissement de leurs effets au cours du temps. Oui, c’est dingue de dire à un patient de régler lui-même la posologie d’un psychotrope, comme ça tranquillou billou, mais voilà, ce monsieur n’en était ni à sa première ni à sa dernière « bourde » (il n’a jamais été inquiété par le conseil de l’ordre, ni par la sécu, ni par aucun patient à qui il prescrivait une pleine page (parfois deux) de médicaments à chaque consultation). Oups !

Vous vous en doutez déjà, il est arrivé ce qui devait arriver : ma grand-mère est devenue accro aux somnifères et aux antidépresseurs (parce qu’il lui avait évidemment prescrit les deux, en plus de tous les autres médicaments pour ci ou ça qu’elle avalait tous les jours). Et un jour, elle s’est mise à avoir des hallucinations, nous racontant que les pigeons (voilà, j’y reviens) voulaient lui picorer les yeux et qu’ils la guettaient quand elle sortait.

A l’hôpital, ils ont pudiquement mis un mouchoir sur ce cas manifeste de grand n’importe quoi thérapeutique et sur le fait que son médecin avait transformé cette ménagère de plus de 50 ans en junkie, en disant qu’elle avait malheureusement fait (tenez-vous bien) un empoisonnement du sang par les médicaments. Mais qu’est-ce que c’est que cette expression de merde crotte de bique ?

Ils l’ont sevrée. Elle a arrêté de prendre ces médocs à la con inutiles dans son cas. Elle est redevenue la grand-mère normale (enfin, normale comme elle l’était avant c’est-à-dire névrosée et caractérielle) que je connaissais depuis ma naissance et tout le monde a oublié cette histoire (sauf moi, apparemment). Depuis, elle en a gardé une haine des pigeons – et dans son cas, c’est bien compréhensible – mais pas de son fameux médecin qu’elle a gardé jusqu’à ce qu’il parte en retraite parce qu’elle le trouvait gentil. Mais woui mais ma pauv’ dame, la gentillesse ça ne fait pas tout et en matière de compétences médicales et ce n’est pas forcément un gage de fiabilité (même s’il est vrai qu’il est quand même plus agréable de consulter des professionnels de santé aimables et cordiaux).

Tout ça pour dire que moi, j’aime bien les pigeons parce que je trouve qu’ils ont tout compris à la vie : ils ne se plaignent jamais, ils aiment bien se faire des câlins les uns les autres, ils chantent dans le vent glacé (comme tous les oiseaux, Dominique A) et ils se sont adaptés aux conditions de vie difficiles que nous leur avons imposées.

Chapeau le pigeon (mais enlève quand même cette fichue feuille si tu ne veux pas te prendre un mur) !

nanowrimo 2021

Des feuilles mortes d'érable - Place Chaméane à Nevers
Feuilles mortes – 31 octobre 2021 – Place Chaméane, Nevers

Le NaNoWriMo (parce que c’est comme ça que ça s’écrit) signifie National Novel Writing Month. Il a été créé en 1999 et depuis, a pas mal évolué. Je pense que j’en ai déjà parlé sur ce blog, à moins que ce soit sur le précédent (lorsque j’étais chez over-blog), je ne sais plus mais je suis quasiment sûre que Cristophe s’en souvient. Vous savez Cristophe, le plus fidèle de mes lecteurs que je n’ai jamais rencontré mais qui est toujours là, après toutes ces années. Il est celui qui butine, allez-y, c’est mieux que facebook.

J’ai donc déjà été tentée d’y participer et j’ai même déjà essayé mais puisque je ne l’ai jamais fini, je re-tente cette année.

Mon objectif actuel n’est certainement pas d’écrire 50 000 mots pour mon roman. Je l’ai déjà dit, mon travail salarié actuel aspire beaucoup trop de mon énergie mentale pour que ce soit réalisable : je suis chargée (entre autres choses) de rédiger une brochure et un mini-site internet. Je vais donc être donc bien moins ambitieuse et bien moins rigide. On fait ce qu’on peut mais comme, de toutes façons, je suis trop rigide en général, ça ne me fera pas de mal de lâcher un peu de lest.

D’abord, je vais répartir mon effort sur 4 supports différents : ce blog, mon site pro (je vous remets le lien au cas où vous l’auriez loupé), mon roman en cours de rédaction (environ 35 000 mots actuellement) et un projet de cartes projectives que j’ai sous le coude depuis un moment (commencé et jamais fini). Mais qu’est-ce que c’est que des cartes projectives ? Mystère et boule de gomme ! Je vous en dirais plus lorsqu’elles seront rédigées, illustrées, imprimées et prêtes pour la vente ; ce qui arrivera un jour sûrement mais pas bientôt.

Pourquoi 4 supports ? Je pourrais dire que c’est pour varier les plaisirs et dans un sens, c’est un peu vrai. Mais la vérité, c’est que j’ai peur. Je flippe que ça n’avance pas comme je le veux, que ce que je vais écrire soit nul et blablabla et blablabla (je vous passe les tergiversations mentales des personnes qui souffrent du syndrome de l’imposteur – si ça vous branche de les connaitre, cherchez un peu dans mes anciens posts, il y en a plein :-D).

Et donc, si j’écris un peu sur chacun de ces projets, j’espère que ça se verra moins…

Et ensuite, je ne me donne pas vraiment d’impératif de nombre de mots (en vrai, je me suis dit 30 000 mais laissons tomber les chiffres, c’est surfait). Pourquoi ? Parce que j’ai peur (voir les deux paragraphes précédents).

A la place, je vais essayer d’écrire tous les jours du mois de novembre (oui, le nanowrimo, c’est en novembre) pendant 45 minutes en plus des 10 minutes matinales quotidiennes que je consacre à mon journal intime. Purée de pois, la meuf qu’arrête pas de se raconter !!

Ecrire est à la fois une de mes activités préférées et une de celles que je redoute le plus. C’est un peu comme quand on décide d’aller à la piscine au moins une fois par semaine. C’est génial en été (aucun effort n’est requis pour plonger dans le grand bain) mais l’idée de passer une heure dans l’eau en plein hiver rebute pas mal. Il faut des trésors d’imagination (qu’est-ce qu’on se sentira mieux après !) et de volonté pour enfourcher son vélo, se déshabiller dans les vestiaires hyper-ventilés (mais pourquoi tant de haine, merde !) et passer sous la douche glacée avant d’enchaîner les longueurs jusqu’au deuxième souffle. Et après, ça roule. Limite, faudrait qu’on vous mette un pistolet sur la tempe (bon ok, j’exagère) pour sortir de l’eau.

Voilà ce que je ressens quand je me mets à écrire, parfois ! Mais parfois aussi, ça sort tout seul (oups, désolée, je n’ai pas pu me retenir) et là, c’est Byzance. Lorsque j’allais nager deux ou trois fois par semaine (pitié, je veux une piscine !!!!), je ne me posais même plus la question de la météo ; j’y allais, point ! Je voudrais bien que le NaNoWriMo provoque le même effet en moi…

J’ai déjà quelques idées de posts pour le blog sur lequel vous êtes actuellement (je tease) :

  • je ne suis plus en colère
  • mon ami le serrurier
  • la suite de ma vie (ah bon, y’a une suite ?)

Ah et mine de rien, je viens d’écrire un peu plus de 730 mots ! Oui, oui, les chiffres, c’est le mal mais quand même, je ne peux pas m’empêcher d’être fière de moi. Un jour après l’autre cocotte, ne vends pas la peau de l’ours etc.

Et au fait, si vous aussi vous participez au NaNoWriMo, je serais vraiment super heureuse qu’on échange nos liens de blogs (a minima) voire même qu’on en discute.

pomme est amoureuse

Pomme (mais j’aurais pu tout aussi bien l’appeler Myrtille, Framboise ou Clémentine) a 17 ans et elle est amoureuse pour la première fois.

Elle n’est pas amoureuse du garçon qui l’a ramenée hier matin en voiture après une semaine de sexe et de pains au chocolat dans sa caravane.

Elle n’est pas amoureuse non plus de celui qui a tenté vainement de la « déflorer » (comme c’est désuet) l’été dernier ou de celui qui lui écrit des poèmes depuis le début de l’année scolaire. C’est mignon mais quelle barbe !

Non ! Pomme est amoureuse d’Ébène (qui aurait pu se nommer Santal ou Mimosa, lui aussi). Ils se sont percutés à la sortie du self. Son incisive inférieure gauche n’a pas résisté au choc de la rencontre (il faut dire qu’il portait encore son casque – ben oui, il fait de la moto). Elle l’a senti se fendre dans la largeur.

Depuis elle s’empêche de sourire (une dent cassée, la honte !) même si ses copines et sa mère disent que ça ne se voit pas. Depuis, elle le piste dans les couloirs. Parfois, elle se doute qu’il est juste derrière elle alors elle ne se retourne pas de peur qu’il la remarque.

De loin, elle le voit fumer sous le préau (oui, cette histoire se déroule à un moment où on avait le droit de fumer dans les cours des lycées). Avec ses potes, ils squattent toujours le même banc, le cinquième en partant du hall – celui qui est le plus proche des ateliers. Il est dans une section technique, elle est une littéraire.

Florence (Sandrine, Stéphanie ou Céline) lui a dit que le meilleur pote du cousin de son voisin le connaissait… Il paraît qu’il préfère la mécanique aux filles. Il paraît qu’il habite Fontainebleau. Il paraît que sa mère est en HP. Il paraît qu’il ne boit jamais d’alcool…

D’habitude si enjouée, rentre-dedans et lumineuse, Pomme est déconcertée. Elle lui est manifestement invisible. Elle ne fume pas, ne connaît rien à la mécanique, ne sait pas où se trouve Fontainebleau. Leur seul point commun, c’est leur manque d’appétence pour la boisson.

Laurent (Cédric, Fabien ou Christophe) l’a invitée à son anniversaire. Elle y va avec sa troupe de copines. Elle trouvera bien un garçon avec qui passer la nuit… Sa mère s’en fout. Elle se fout de tout sauf de sa moyenne générale. En plus, elle sera d’astreinte cette nuit.

La fête bat son plein et elle danse comme une folle. Depuis un bon quart d’heure, elle échange des œillades avec un gars de terminale. Blond aux yeux bleus, le BCBG classique avec un polo pastel, un pull sur les épaules et des mocassins. Le genre de type facile à emballer. Sophie (Catherine, Christine…) lu a dit qu’il était en term’ et qu’il s’appelait JB. Il est parfait pour finir la soirée.

Sauf qu’Ébène se matérialise miraculeusement à côté d’elle deux minutes avant qu’elle passe à l’attaque. Sauf qu’Ébène lui dit que c’est drôlement mignon, cette petite dent du bas cassée. Sauf qu’il lui prend la main et l’entraîne sur la piste.

Alors Pomme enferme à double-tour ses angoisses de n’être pas assez ou trop quelque chose et sourit de toutes ses dents à ce bel inconnu qui va devenir, elle en est sûre, son grand amour.

Dans quelques semaines, elle deviendra une moitié du duo « Ébène et Pomme » et puis très vite, elle sera « la meuf d’Ébène ». Plus la moitié mais l’assistante. Un jour, on l’appellera Madame ou Maman. Elle mettra des années encore à se sevrer de ses yeux si noirs et de ses cheveux si doux… et ce sera déjà la fin.