Je suis arrivée hier en fin de journée. Installée non loin de l’accueil dans un premier temps, j’ai rapidement déménagé pour un endroit plus calme, non loin d’une cycliste.
C’est un camping municipal. J’aime ce genre d’endroit. Pas de piscine ni d’animation. Des sanitaires à peu près propres (tous ne sont pas ouverts – ils le seront sans doute cet été). Une salle télé et une salle de repas fermées toutes les deux (dommage, des orages sont prévus, cela nous aurait peut-être rapprochés). Il n’y a aucun enfant à l’horizon mais chaque couple est doté d’un chien.
Ce matin, plusieurs camping-cars sont partis (c’est la mode des camping-cars, il n’y a presque que ça ici). Une seule tente, celle de la cycliste. Depuis le milieu de l’après-midi, le camping se remplit doucement.
Deux jeunes couples de gens du voyage viennent d’arriver. Je suis étonnée de leur présence dans un camping d’une part et aussi de la richesse apparente de leurs deux caravanes et de leurs deux fourgons. Mais ce n’est pas tout, une des jeunes femmes est arrivée au volant d’une voiture grise rutilante tirant une remorque. Je les observe de loin et je suis fascinée. Les deux hommes ont réglé l’installation du campement en quelques minutes – ils ont sans doute l’habitude.
Leur arrivée semble gêner les deux couples de sexagénaires en camping-cars installés de l’autre côté de l’allée. J’ai entendu l’un des deux hommes bedonnants dire à sa compagne puis à l’autre homme (qui s’est sans doute empressé de rapporter l’affaire à sa dame, retranchée dans son logis mobile) que quand même ça allait bien et qu’ils (les jeunes) prenaient beaucoup de place (bon c’est vrai que leurs caravanes sont énormes). Son interlocuteur a opiné du chef plusieurs fois d’un air entendu en regardant les jeunes par en dessous. Du coup, ils ont sorti une table supplémentaire – pour occuper plus de place afin j’imagine, de ne pas se faire envahir par l’ennemi.
Une des jeunes femmes s’est immédiatement mise à nettoyer les voitures de fond en comble : aspirateur, nettoyage à l’eau savonneuse de l’intérieur puis de l’extérieur. Pendant ce temps-là, les hommes ont déployé ce qui se trouvait dans la remorque mystérieuse : une cuisine d’extérieure complète. Tout cet équipement a du coûter un bras. J’imagine qu’ils et elles ont du bosser comme des dingues pour se payer tout ça.
Je me sens inexorablement attirée par eux. Je ne sais pas trop pourquoi. J’ai envie de leur poser des tas de questions mais je ne le ferai pas. Je suis trop timide et puis, nous ne sommes pas de la même génération. Ils trouveraient sûrement ça pénible qu’une vieille dans mon genre viennent les interroger. J’aimerais les interviewer pour mon podcast. Je suis sûre qu’ils ont des choses à m’apprendre sur le bonheur et sur la liberté, ces quatre-là.
Nous venons de friser le psychodrame ! L’un des jeunes qui revenait de la douche a pénétré sur la parcelle des deux bedonnants d’en face (c’est le chemin le plus court pour rejoindre sa caravane). Il a été vertement tancé, comme il se doit ! Après de plates excuses, les bedonnants se sentaient tout ragaillardis. Du coup, ils viennent de sortir l’apéro pour fêter ça.