C’est étrange. Je n’avais jamais remarqué qu’il y avait des arbres à droite du bassin principal. Ils y sont pourtant depuis toujours, forcément. Est-ce leurs couleurs qui me les rendent accessibles aujourd’hui ? Comment se fait-il que j’ai pu passer tout ce temps à regarder par cette fenêtre sans rien discerner des nuances que le parc m’offrait ? Est-ce seulement possible d’être aveugle à ce point ? Toutes ces années, tous ces doutes, tous ces sacrifices sans avoir conscience que j’avais un paradis devant les yeux.
J’étais loin de tout, par la force des choses. Je l’avais tellement voulu ce château que je m’y suis enfermée, coincée, claquemurée et j’avais fait ce que je devais faire. A cette époque, une femme seule n’aurait pas été respectée, même une de Moûtier. Je n’ai profité de rien. J’ai toujours vécu dans l’ombre. Un demi-siècle perdu. J’aurais dû courir à travers le parc, me saouler de soleil, mettre mes mains dans cette terre qui était mienne. Mais j’étais jeune, intéressée par d’autres trésors, moins salissants. J’avais choisi les dorures et les billets, le champagne, les mets raffinés et les tenues délicates.
Désormais, mes sens sont altérés et il est sans doute trop tard. Ma peau ne sent plus aussi bien la texture des étoffes précieuses que je porte. Pourtant, je ne dois pas ce que je vois ce matin pour la première fois à un changement de lunettes. J’ai désormais accès à la beauté. Je me réveille d’un trop long sommeil sans rêve. Le parc entier est nimbé d’une lumière saisissante. Je vois enfin la multitude des ocres et des verts, des azurs et des grenats. Au loin, le parc est encore embrumé. Il va faire beau aujourd’hui. Sentir la mousse sous mes pieds nus. Respirer le parfum des grands cèdres, toucher leur grand tronc rugueux.
Je demanderai à Philippe de m’accompagner cet après-midi. Faire le tour du domaine, m’approcher de cette forme blanche qui se reflète dans l’eau. Une sculpture ? Qui a bien pu la placer là et quand ? Je distingue au loin un chemin que je n’ai jamais pris. On m’a dit que des promeneurs y passent de temps en temps, pour profiter de la douceur de la pente et du point de vue sur le village.
Bon, j’ai fait très court cette semaine… Je n’ai pas été très inspirée.
Moi ? Nulle muse m’habite.
J’ai comme l’impression qu’il y a une contrepèterie (voire deux) mais je ne suis pas très bonne à ce jeu là 😉
Je n’ai pensé à nulle contrepèterie et s’il y en a au moins une elle m’échappe.
Tiens donc !