la haine des pigeons

Je ne me souviens plus d’où vient cette image, crotte de bique.

A chaque fois que je suis amenée à parler « pigeon » avec quelqu’un – ce qui n’arrive pas tous les quatre matins, je le concède – la personne en face de moi me raconte sa haine, sa détestation, son dégoût des pigeons.

Certains les nomment les rats des airs, d’autres les trouvent cons comme la lune… Bref, la plupart du temps, ils n’ont pas bonne presse.

Alors oui, ils font caca partout mais s’ils ont colonisé nos villes c’est parce que nous, les humains, leur donnons à manger dans nos poubelles.

Si vous habitez Paris – même si vous ne faites qu’y passer, d’ailleurs – et que vous vous retrouvez pas loin d’un parc (une simple plate-bande suffit) à la tombée de la nuit, vous pourrez voir des dizaines de rats sortir d’en dessous, se glisser dans des anfractuosités cachées et escalader les poubelles pour s’y nourrir. Ils ont investi nos villes parce que nous les nourrissons. Brrr, j’en ai froid dans le dos !

Mais revenons à nos pigeons ! Sont-ils idiots ? A priori, le fait de choisir de vivre dans des endroits avec un accès illimité à la nourriture n’est pas complètement absurde. Ils font comme nous (et comme les rats d’ailleurs). En fait non, ils font même mieux que nous puisque, jusqu’à preuve du contraire le béton, le bitume et le verre n’ont aucun pouvoir de création de nourriture… Et pourtant nous nous y entassons.

Ensuite, moi je les trouve plutôt placides et de bonne composition. Ils évoluent tranquillement par terre et se poussent juste assez pour que nous puissions passer sans leur marcher dessus. Ils roucoulent à qui mieux mieux quelle que soit la météo et ils ne sont pas agressifs, à part dans les hallucinations de ma grand-mère.

Là, il faut que j’explique évidemment pourquoi ma grand-mère voue une véritable haine aux pigeons. Il y a une trentaine d’années (mon grand-père vivait toujours), elle s’est mise à prendre beaucoup mais alors beaucoup trop de médicaments pour dormir. Son « médecin » (je mets entre guillemets ce mot parce que, vu ce qui suit, on peut douter de ses compétences professionnelles) lui avait prescrit des somnifères et lui avait dit qu’elle pourrait augmenter la dose régulièrement au fur et à mesure de l’affaiblissement de leurs effets au cours du temps. Oui, c’est dingue de dire à un patient de régler lui-même la posologie d’un psychotrope, comme ça tranquillou billou, mais voilà, ce monsieur n’en était ni à sa première ni à sa dernière « bourde » (il n’a jamais été inquiété par le conseil de l’ordre, ni par la sécu, ni par aucun patient à qui il prescrivait une pleine page (parfois deux) de médicaments à chaque consultation). Oups !

Vous vous en doutez déjà, il est arrivé ce qui devait arriver : ma grand-mère est devenue accro aux somnifères et aux antidépresseurs (parce qu’il lui avait évidemment prescrit les deux, en plus de tous les autres médicaments pour ci ou ça qu’elle avalait tous les jours). Et un jour, elle s’est mise à avoir des hallucinations, nous racontant que les pigeons (voilà, j’y reviens) voulaient lui picorer les yeux et qu’ils la guettaient quand elle sortait.

A l’hôpital, ils ont pudiquement mis un mouchoir sur ce cas manifeste de grand n’importe quoi thérapeutique et sur le fait que son médecin avait transformé cette ménagère de plus de 50 ans en junkie, en disant qu’elle avait malheureusement fait (tenez-vous bien) un empoisonnement du sang par les médicaments. Mais qu’est-ce que c’est que cette expression de merde crotte de bique ?

Ils l’ont sevrée. Elle a arrêté de prendre ces médocs à la con inutiles dans son cas. Elle est redevenue la grand-mère normale (enfin, normale comme elle l’était avant c’est-à-dire névrosée et caractérielle) que je connaissais depuis ma naissance et tout le monde a oublié cette histoire (sauf moi, apparemment). Depuis, elle en a gardé une haine des pigeons – et dans son cas, c’est bien compréhensible – mais pas de son fameux médecin qu’elle a gardé jusqu’à ce qu’il parte en retraite parce qu’elle le trouvait gentil. Mais woui mais ma pauv’ dame, la gentillesse ça ne fait pas tout et en matière de compétences médicales et ce n’est pas forcément un gage de fiabilité (même s’il est vrai qu’il est quand même plus agréable de consulter des professionnels de santé aimables et cordiaux).

Tout ça pour dire que moi, j’aime bien les pigeons parce que je trouve qu’ils ont tout compris à la vie : ils ne se plaignent jamais, ils aiment bien se faire des câlins les uns les autres, ils chantent dans le vent glacé (comme tous les oiseaux, Dominique A) et ils se sont adaptés aux conditions de vie difficiles que nous leur avons imposées.

Chapeau le pigeon (mais enlève quand même cette fichue feuille si tu ne veux pas te prendre un mur) !

nanowrimo 2021

Des feuilles mortes d'érable - Place Chaméane à Nevers
Feuilles mortes – 31 octobre 2021 – Place Chaméane, Nevers

Le NaNoWriMo (parce que c’est comme ça que ça s’écrit) signifie National Novel Writing Month. Il a été créé en 1999 et depuis, a pas mal évolué. Je pense que j’en ai déjà parlé sur ce blog, à moins que ce soit sur le précédent (lorsque j’étais chez over-blog), je ne sais plus mais je suis quasiment sûre que Cristophe s’en souvient. Vous savez Cristophe, le plus fidèle de mes lecteurs que je n’ai jamais rencontré mais qui est toujours là, après toutes ces années. Il est celui qui butine, allez-y, c’est mieux que facebook.

J’ai donc déjà été tentée d’y participer et j’ai même déjà essayé mais puisque je ne l’ai jamais fini, je re-tente cette année.

Mon objectif actuel n’est certainement pas d’écrire 50 000 mots pour mon roman. Je l’ai déjà dit, mon travail salarié actuel aspire beaucoup trop de mon énergie mentale pour que ce soit réalisable : je suis chargée (entre autres choses) de rédiger une brochure et un mini-site internet. Je vais donc être donc bien moins ambitieuse et bien moins rigide. On fait ce qu’on peut mais comme, de toutes façons, je suis trop rigide en général, ça ne me fera pas de mal de lâcher un peu de lest.

D’abord, je vais répartir mon effort sur 4 supports différents : ce blog, mon site pro (je vous remets le lien au cas où vous l’auriez loupé), mon roman en cours de rédaction (environ 35 000 mots actuellement) et un projet de cartes projectives que j’ai sous le coude depuis un moment (commencé et jamais fini). Mais qu’est-ce que c’est que des cartes projectives ? Mystère et boule de gomme ! Je vous en dirais plus lorsqu’elles seront rédigées, illustrées, imprimées et prêtes pour la vente ; ce qui arrivera un jour sûrement mais pas bientôt.

Pourquoi 4 supports ? Je pourrais dire que c’est pour varier les plaisirs et dans un sens, c’est un peu vrai. Mais la vérité, c’est que j’ai peur. Je flippe que ça n’avance pas comme je le veux, que ce que je vais écrire soit nul et blablabla et blablabla (je vous passe les tergiversations mentales des personnes qui souffrent du syndrome de l’imposteur – si ça vous branche de les connaitre, cherchez un peu dans mes anciens posts, il y en a plein :-D).

Et donc, si j’écris un peu sur chacun de ces projets, j’espère que ça se verra moins…

Et ensuite, je ne me donne pas vraiment d’impératif de nombre de mots (en vrai, je me suis dit 30 000 mais laissons tomber les chiffres, c’est surfait). Pourquoi ? Parce que j’ai peur (voir les deux paragraphes précédents).

A la place, je vais essayer d’écrire tous les jours du mois de novembre (oui, le nanowrimo, c’est en novembre) pendant 45 minutes en plus des 10 minutes matinales quotidiennes que je consacre à mon journal intime. Purée de pois, la meuf qu’arrête pas de se raconter !!

Ecrire est à la fois une de mes activités préférées et une de celles que je redoute le plus. C’est un peu comme quand on décide d’aller à la piscine au moins une fois par semaine. C’est génial en été (aucun effort n’est requis pour plonger dans le grand bain) mais l’idée de passer une heure dans l’eau en plein hiver rebute pas mal. Il faut des trésors d’imagination (qu’est-ce qu’on se sentira mieux après !) et de volonté pour enfourcher son vélo, se déshabiller dans les vestiaires hyper-ventilés (mais pourquoi tant de haine, merde !) et passer sous la douche glacée avant d’enchaîner les longueurs jusqu’au deuxième souffle. Et après, ça roule. Limite, faudrait qu’on vous mette un pistolet sur la tempe (bon ok, j’exagère) pour sortir de l’eau.

Voilà ce que je ressens quand je me mets à écrire, parfois ! Mais parfois aussi, ça sort tout seul (oups, désolée, je n’ai pas pu me retenir) et là, c’est Byzance. Lorsque j’allais nager deux ou trois fois par semaine (pitié, je veux une piscine !!!!), je ne me posais même plus la question de la météo ; j’y allais, point ! Je voudrais bien que le NaNoWriMo provoque le même effet en moi…

J’ai déjà quelques idées de posts pour le blog sur lequel vous êtes actuellement (je tease) :

  • je ne suis plus en colère
  • mon ami le serrurier
  • la suite de ma vie (ah bon, y’a une suite ?)

Ah et mine de rien, je viens d’écrire un peu plus de 730 mots ! Oui, oui, les chiffres, c’est le mal mais quand même, je ne peux pas m’empêcher d’être fière de moi. Un jour après l’autre cocotte, ne vends pas la peau de l’ours etc.

Et au fait, si vous aussi vous participez au NaNoWriMo, je serais vraiment super heureuse qu’on échange nos liens de blogs (a minima) voire même qu’on en discute.

pomme est amoureuse

Pomme (mais j’aurais pu tout aussi bien l’appeler Myrtille, Framboise ou Clémentine) a 17 ans et elle est amoureuse pour la première fois.

Elle n’est pas amoureuse du garçon qui l’a ramenée hier matin en voiture après une semaine de sexe et de pains au chocolat dans sa caravane.

Elle n’est pas amoureuse non plus de celui qui a tenté vainement de la « déflorer » (comme c’est désuet) l’été dernier ou de celui qui lui écrit des poèmes depuis le début de l’année scolaire. C’est mignon mais quelle barbe !

Non ! Pomme est amoureuse d’Ébène (qui aurait pu se nommer Santal ou Mimosa, lui aussi). Ils se sont percutés à la sortie du self. Son incisive inférieure gauche n’a pas résisté au choc de la rencontre (il faut dire qu’il portait encore son casque – ben oui, il fait de la moto). Elle l’a senti se fendre dans la largeur.

Depuis elle s’empêche de sourire (une dent cassée, la honte !) même si ses copines et sa mère disent que ça ne se voit pas. Depuis, elle le piste dans les couloirs. Parfois, elle se doute qu’il est juste derrière elle alors elle ne se retourne pas de peur qu’il la remarque.

De loin, elle le voit fumer sous le préau (oui, cette histoire se déroule à un moment où on avait le droit de fumer dans les cours des lycées). Avec ses potes, ils squattent toujours le même banc, le cinquième en partant du hall – celui qui est le plus proche des ateliers. Il est dans une section technique, elle est une littéraire.

Florence (Sandrine, Stéphanie ou Céline) lui a dit que le meilleur pote du cousin de son voisin le connaissait… Il paraît qu’il préfère la mécanique aux filles. Il paraît qu’il habite Fontainebleau. Il paraît que sa mère est en HP. Il paraît qu’il ne boit jamais d’alcool…

D’habitude si enjouée, rentre-dedans et lumineuse, Pomme est déconcertée. Elle lui est manifestement invisible. Elle ne fume pas, ne connaît rien à la mécanique, ne sait pas où se trouve Fontainebleau. Leur seul point commun, c’est leur manque d’appétence pour la boisson.

Laurent (Cédric, Fabien ou Christophe) l’a invitée à son anniversaire. Elle y va avec sa troupe de copines. Elle trouvera bien un garçon avec qui passer la nuit… Sa mère s’en fout. Elle se fout de tout sauf de sa moyenne générale. En plus, elle sera d’astreinte cette nuit.

La fête bat son plein et elle danse comme une folle. Depuis un bon quart d’heure, elle échange des œillades avec un gars de terminale. Blond aux yeux bleus, le BCBG classique avec un polo pastel, un pull sur les épaules et des mocassins. Le genre de type facile à emballer. Sophie (Catherine, Christine…) lu a dit qu’il était en term’ et qu’il s’appelait JB. Il est parfait pour finir la soirée.

Sauf qu’Ébène se matérialise miraculeusement à côté d’elle deux minutes avant qu’elle passe à l’attaque. Sauf qu’Ébène lui dit que c’est drôlement mignon, cette petite dent du bas cassée. Sauf qu’il lui prend la main et l’entraîne sur la piste.

Alors Pomme enferme à double-tour ses angoisses de n’être pas assez ou trop quelque chose et sourit de toutes ses dents à ce bel inconnu qui va devenir, elle en est sûre, son grand amour.

Dans quelques semaines, elle deviendra une moitié du duo « Ébène et Pomme » et puis très vite, elle sera « la meuf d’Ébène ». Plus la moitié mais l’assistante. Un jour, on l’appellera Madame ou Maman. Elle mettra des années encore à se sevrer de ses yeux si noirs et de ses cheveux si doux… et ce sera déjà la fin.

D-DAY

Photo by Arthur Mazi on Unsplash

doutes
découverte
déni
démembrement
dégoût
désolation
déstabilisation
déshumanisation
douleur
désamour
désespoir
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dépression
démystification
désert
désunion
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défaillance
dureté
droits
devoirs
dépit
désillusion
désarmement
désarroi
déséquilibre
distance
discordance

divorce ?
divorce.
divorce !

dosvidania
décrassage
décontamination
départ
dormir
direction
discernement
douceur
désir
danser
dignité
délicieux
dénouement
demain
deux ?

le rêve de l’hippocampe

Photo by David Clode on Unsplash

Je paraphrase ici le titre d’un roman que j’ai lu il y a un mois et que j’ai adoré. Dans ce livre, rêver d’un okapi est plutôt mauvais signe… Je ne sais pas ce qu’a écrit d’autre Mariana Leky mais j’ai bien envie de creuser parce que ça faisait longtemps que je n’avais pas croisé une écrivaine de cette qualité.

J’ai fait un drôle de rêve cette nuit : je suis dans un train avec des tas de personnes, toutes vélorutionnaires (nous n’avons pas nos vélos avec nous mais, ne me demandez pas pourquoi, je sais que tous les gens autour partagent mes valeurs – certains visages me sont connus d’autres non). Puis, après quelques kilomètres de chants (oui, nous chantons tous ensemble – un vrai rêve de hippie !), le train nous dépose dans une crique au bord de l’océan (je ne sais pas lequel). Tout le monde débarque donc et nous nous précipitons dans l’eau. En ce qui me concerne, et ça n’a rien à voir avec le rêve en question, puisque je n’ai pas de maillot, j’y vais cul nu.

J’appréhende un peu, rapport à la température de l’eau que j’imagine frisquette mais pas du tout, l’océan est chaud, doux et légèrement sirupeux- comme du liquide amniotique.

Tout le monde nage, s’ébroue, discute à bâton rompu. On est là, tous bien dans notre peau. Je me sens super bien avec tous ces gens, dans l’eau. Je pense que je suis entourée d’ami.es, que j’aime profondément et qui m’aiment profondément. C’est vraiment génial mais ce n’est encore rien par rapport à ce qui suit.

Je lève les yeux et je vois des centaines d’étoiles – il fait nuit mais on voit assez clair – colorées qui bougent (dansent ?) et se connectent (un peu comme les jeux quand on était petit où, lorsqu’on reliait des points entre eux dans le bon ordre, on découvrait une image) et finissent par former des images qui scintillent. Je ne me souviens que de l’une d’entre elles : un hippocampe de toutes les couleurs !

C’est d’une beauté à couper le souffle – encore plus beau qu’un feu d’artifice et dieu sait que j’aime ça – et je n’arrête pas de rigoler parce que je me sens tellement bien que c’en est dingue.

Je n’ai jamais pris de drogues hallucinogènes mais j’imagine que ça ressemble un peu à cette sensation – quand ça se passe bien.

J’ai regardé le symbolisme de l’hippocampe (ce n’est pas quelque chose que je fais d’habitude mais j’ai une copine qui aime bien ça et comme je me sens connectée à elle en ce moment, ben voilà) : ça parle de solidarité, d’amitié, de douceur, du fait d’apprécier sa vie, le moment présent…

J’ai l’impression (ou plutôt j’aimerais bien) que ce rêve marque le début d’une nouvelle période de ma vie. Mais plus prosaïquement, peut-être que cette mer douce et chaude ne reflétait que la tiédeur de mon lit, au petit matin.

Je suis attablée dans la salle de cette fausse boulangerie, un dimanche matin comme un autre. Je bois un déca allongé. J’ai les doigts gras à cause du pain au raisin industriel que je viens d’avaler. Il pleut des cordes. Les gens défilent et commandent des pains au chocolat, des baguettes bien cuites et des chouquettes.

Mon minuteur vient de sonner – mes petites culottes sont propres, plus qu’à les faire sécher – une vieille chanson des années 80 passe à la radio…